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L’éco-conception dans le Product Management

9 Minutes

Dans le Product Management, nous sommes constamment à la recherche de moyens pour créer des produits et des services numériques innovants et performants.

Il est important de prendre en compte également une approche qui va au-delà de la simple efficacité et qui intègre les préoccupations environnementales. Cela est rendu possible par une méthode visant à réduire l’impact environnemental des produits et services tout au long de leur cycle de vie.

L’éco-conception a pour objectif de placer l’environnement au cœur du processus de conception et de développement.

Tout comme l’approche “user-centric” met l’utilisateur au centre de la conception, et l’approche “data-centric” se base sur des analyses quantitatives et qualitatives, une éco-conception dans et la conception de produit numérique, c’est un peu l’approche “carbon-centric” qui vise à prioriser les fonctionnalités en fonction de leur impact sur notre environnement.

Intégration de l’éco-conception dans le cycle de vie du produit

Le cycle de vie d’un produit comporte 4 grandes étapes : la conception, le développement, l’hébergement et la fin de vie. Dans le cadre de l’éco-conception, chaque étape est importante et ne doit pas être sous-estimée.

Durant la phase de conception

L’étape de conception est cruciale pour intégrer des considérations environnementales dans le produit dès le départ.

Cela implique une analyse approfondie des besoins des utilisateurs afin de concevoir des fonctionnalités qui minimisent l’impact énergétique. Par exemple, lors de la conception d’une nouvelle fonctionnalité, il est important de se demander si cette fonctionnalité est réellement nécessaire pour répondre aux besoins des utilisateurs ou si elle pourrait être optimisée pour réduire sa consommation d’énergie.

Il ne faut pas hésiter à remettre en question les besoins des utilisateurs en prenant en compte les impacts environnementaux potentiellement négatifs.

À titre d’exemple, prenons le cas vécu d’un utilisateur souhaitant fortement être notifié par e-mail à chaque changement de statut de son dossier bancaire. Bien que cette fonctionnalité semble utile à première vue, elle présente plusieurs problématiques:

  • Elle risque tout d’abord de générer un spam potentiel, étant donné que les dossiers peuvent faire des allers-retours et qu’il y en a des milliers par an.
  • Elle contribue à la pollution numérique, chaque e-mail comportant des logos et une signature, ce qui équivaut à une émission inutile de CO2.

Pour contourner le problème tout en répondant au besoin, nous avons décidé de mettre en place un système de notification interne au produit, permettant aux utilisateurs de suivre les dernières activités sur les dossiers à travers un centre notification !

Une fois les développements démarrés

Pendant l’étape de développement, il est essentiel d’utiliser des algorithmes efficaces et du cache local pour réduire la consommation de ressources informatiques pour éviter les requêtes répétées vers des serveurs distants.

Dans les réflexions autour de l’hébergement des données

L’étape d’hébergement concerne la manière dont les ressources informatiques sont déployées et gérées. Pour réduire la consommation d’énergie, il est important d’optimiser les ressources en adoptant des pratiques telles que la mise en veille des serveurs pendant les périodes d’inactivité.

En effet, on peut très bien imaginer que notre produit soit mis en veille automatiquement pendant les heures creuses ou de non-utilisation. Deux impacts positifs majeurs : une réduction drastique de la consommation d’énergie et in-fine, une réduction des couts !

Sans oublier la fin de vie de notre produit

Souvent négligée, l’étape de fin de vie d’un produit concerne la manière dont les produits conçus et développés sont retirés du service une fois qu’ils ne sont plus utilisés. Pour éviter une surconsommation de ressources, il est important de décommissionner les applications qui ne sont plus utilisées.

Cela implique de supprimer les données inutilisées (coucou le RGPD), de désactiver les fonctionnalités obsolètes et de libérer les ressources informatiques pour une utilisation plus efficace. Les ressources hardwares et humaines dédiées à la maintenance d’anciennes applications non utilisés sont donc re-allouées à d’autres tâches réduisant ainsi la consommation général de votre SI !

Comment prioriser les sujets

illustration priorisation de l'éco-conception

Comme pour l’accessibilité il est impossible de traiter tous les cas en matière d’éco-conception. Il est essentiel de réaliser une analyse de l’existant et de prioriser les actions en fonction de leur impact environnemental. Mais alors comment prioriser concrètement les sujets liés à l’éco-conception ?

Identification des “points chauds”

Il est important d’identifier les “points chauds” où l’impact environnemental est le plus significatif. Cela peut inclure des aspects tels que la consommation d’énergie des serveurs, l’utilisation de ressources informatiques, ou la production de déchets numériques.

Pour cela, il existe des outils de monitoring (Hotjar, Amplitude) pour réaliser ces mesures. A partir de là, vous pouvez commencer à mieux comprendre quelles sont les fonctionnalités les plus lourdes et les plus consommatrices d’énergies à travers, par exemple, 3 critères simples :

  • le nombre de requêtes/appels effectuées vers vos serveurs
  • le poids des pages chargées
  • les temps de réponses des différents appels

Le RGESN : la mine d’or de l’éco-conception

Le RGESN est le Référentiel Général d’Eco-conception de Services Numériques

Celui-ci est organisé en différents chapitres (Stratégie, Spécifications, Architecture, UX/UI, Contenus, Frontend, Backend, Hébergement) dans lesquels vous trouverez des dizaines de bonnes pratiques à appliquer, soit une vraie boite à outils de l’éco-conception.

Il s’agit d’un outil dont l’objectif est d’aider les acteurs de l’IT à réduire :

  • la consommation de ressources informatiques
  • la contribution à l’obsolescence des équipements, qu’il s’agisse des équipements utilisateurs ou des équipements réseau ou serveur.

C’est un outil fantastique dédié à toutes les parties-prenantes concernés par le numerique. Le RGESN cible “tous les métiers liés de près ou de loin à la conception d’un service numérique : chef(fe) de projet, assistant(e) à maîtrise d’ouvrage (AMOA), assistant(e) à maitrise d’œuvre, product owner, UX researcher, designer, graphiste, développeur(se), devops, testeur(se), rédacteur ou rédactrice web, contributeur ou contributrice à un outil de gestion de contenu…”

Quelques items pertinents du RGESN

2.1 – Le service numérique a-t-il été conçu avec une revue de conception et une revue de code en ayant pour un des objectifs de réduire les impacts environnementaux de chaque fonctionnalité ?

4.1 – Le service numérique est-il utilisable via une connexion bas débit ?

4.15 – Le service numérique vérifie-t-il des limites de poids et de formats sur les fichiers pouvant être transmis par l’utilisateur ?

8.10 – Le service numérique duplique-t-il les données uniquement lorsque cela est nécessaire ?

Extrait du Référentiel Général d'Eco-conception de Services Numériques concernant les recommendations frontend
Quelques items du chapitre frontend du RGESN

L’éco-conception dans mon quotidien de PM

Vous pouvez intégrer dans votre DoD des chapitres qui concernent l’éco-conception.

Par exemple, vous pouvez très bien considérer que votre fonctionnalité développée est Done si :

  • les nouvelles pages “front” créées pèsent moins de 1mo
  • on effectue moins de 3 requêtes par affichage
  • a ressource est accessible en moins de 7 secondes

Vous pouvez aussi intégrer dans votre DoR, des élements pensés autour de l’éco-conception

Par exemple, mon Epic est Ready à être développée si :

  • la QA/RSE a audité l’impact énergétique de cette Epic / US
  • j’ai checké avant l’item 2.1 du RGESN

Par ailleurs, l’éco-conception se prête particulièrement bien à être intégrée dans des sprints techniques, transverses ou intersprint.

En effet, dans de nombreuses organisations, notamment dans les cadres de travail comme SAFe, il est souvent bénéfique d’allouer du temps spécifique entre les sprints pour aborder des sujets transversaux ou innovants tels que l’éco-conception (ou l’accessibilité d’ailleurs). Cela offre l’opportunité de mobiliser des compétences transverses pour aborder de manière différentes ces sujets.

illustration intersprint

Surmontez les barrières à l’éco-conception

La sensibilisation, la pression hiérarchique, la réticence au changement, le manque de ressources et les coûts initiaux élevés sont autant de défis à relever dans l’intégration de l’éco-conception dans votre organisation produit :

Manque de sensibilisation : l’éco-conception est un sujet très abstrait.

En effet, il est assez difficile de visualiser l’impact négatif sur l’environnement d’une requête SQL vers un data-center situés à l’autre bout de la planète.

Pression de la hiérarchie et réticence au changement : on met souvent la priorité sur les nouvelles features impactantes à sortir rapidement. Et c’est normal, le marché est rude et il est important d’avoir de l’avance sur la concurrence. De plus, les organisations préfèrent rester dans leurs méthodes de travail traditionnelles : pourquoi changer si ca fonctionne très bien actuellement ?

→ Vous pouvez évoquer les enjeux et les gains (de notoriété et économique) apportés grâce à une stratégie produit vertueuse à travers le prisme de l’éco-conception.

Manque de ressources : nous sommes de façon générale, peu formé à ses sujets.

Il existe en effet peu de personnes compétentes et motivées à faire bouger les choses. De plus, ces sujets peuvent vite être très complexes.

→ Il est important de proposer des solutions simples, des quick-wins et y aller étape par étape.

Coûts (initiaux) plus élevés : l’adoption de l’éco-conception nécessite des investissements initiaux potentiellement élevés.

→ Avec une bonne analyse et une priorisation des sujets intelligentes, les investissements initiaux peuvent être de simple quick-win peu-onéreux. Aussi, avec des investissements plus conséquents, les économies d’échelles, à long terme, peuvent être non-négligeables.

Manque d’incitations réglementaires : il n’existe aucune réglementation stricte en matière d’éco-conception dans le secteur numérique.

Le RGESN n’est qu’une liste de recommendations. D’ailleurs, on peut lire sur leur site “Aucun label, ni certificat se basant sur ce référentiel n’est pour l’instant prévu. Il s’agit d’abord de promouvoir une démarche volontaire d’éco-conception des services numériques.”

→ Il n’existe pas encore officiellement le “nutriscore du product”. Peut-être qu’il y a un nouveau produit à concevoir ?

Conclusion

Il est essentiel de reconnaître que l’éco-conception ne peut pas être garantie par les seuls Product Managers. C’est un effort collaboratif qui implique l’ensemble de l’équipe, y compris les designers, les développeurs et les DevOps .

Les principes de l’éco-conception doivent être pris en compte dans toutes les phases du cycle de vie des produits numériques.

Enfin, sensibiliser les utilisateurs à l’importance de l’éco-conception est crucial pour encourager des comportements durables.

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